1. Extraits choisis de littérature médiévale

1. Extraits choisis de littérature médiévale

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Voici quelques extraits issus de textes écrits au Moyen Âge, vous pouvez les télécharger aussi en PDF. N'hésitez pas à créer des topics pour discuter ou poser des questions en bas de ma publication.

La Chanson de Roland (Extrait de la laisse N° V)

Car Roland sent que la mort est proche :

 Par les oreilles lui sort la cervelle.

 Pour ses pairs il prie que Dieu les appelle,

 Et pour lui-même implore l'ange Gabriel.

 Prenant son olifan dans une main, Et Durandal son épée ;

 De plus d'une portée d'arbalète il s'avance vers l'Espagne.

 Au sommet d'un tertre, sous deux beaux arbres

 Il y a quatre blocs de marbre luisant ;

 C'est là qu'il tombe à la renverse, sur l'herbe verte ;

 Il s'est évanoui, la mort est proche

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La Chanson de Roland (Extrait de la laisse N°X)

Roland frappe sur une roche bise ;

 Il en abat plus que je ne saurais dire ;

 L'épée grince, mais ne s'ébrèche ni se brise, Rebondissant en l'air.

 Quand le comte voit qu'il ne la brisera pas,

 Il la plaint bien tendrement en se parlant à lui-même :

 Ah, Durandal, comme tu es bonne et sainte !

 Dans ton pommeau d'or sont de nombreuses reliques,

 Une dent de saint Pierre, du sang de saint Basile,

 Des cheveux de monseigneur saint Denis,

 Du vêtement de sainte Marie;

 II n'est pas juste que des païens te possèdent, C'est de chrétiens que tu dois être honorée.

 Que de vastes terres avec toi j'aurais conquises,

 Que tient Charles, qui a la barbe fleurie ! L'empereur est puissant et riche.

 Ne soit jamais l'épée d'un couard !

 Que Dieu ne permette pas à la France telle honte !

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Je ne sais comment je dure (Christine de Pisan, XIVe)

Je ne sais comment je dure,

Car mon dolent cœur fond d'ire

Et plaindre n'ose, ni dire

Ma douloureuse aventure,

 

Pour ma dolente vie obscure.

Rien, hors la mort ne désire ;

Je ne sais comment je dure.

 

Et il me faut, par couverture,

Chanter pendant que mon cœur soupire

Et faire semblant de rire ;

Mais Dieu sait ce que j'endure.

Je ne sais comment je dure.

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Tristan et Iseult (Joseph Bédier, 1900)

La jeune fille, joliment parée, s'avança avec plus de grâce et plus d'élégance qu'un épervier ou un perroquet. Elle portait un manteau et une tunique taillés dans une étoffe de pourpre sombre étincelante, garnie de fourrure d'hermine soyeuse. Une bordure de zibeline noire et blanche, bien ajustée, ornait le col de son manteau. S'il m'a jamais été donné de décrire la beauté que Dieu pouvait mettre dans le corps et le visage d'une femme, je trouve maintenant l'occasion de le faire à nouveau sans y mettre un mot qui ne soit pas justifié. Ses cheveux, qu'elle portait relâchés, étaient d'un blond si lumineux que celui qui les aurait vus les aurait pris pour des filaments d'or pur. Son front, dégagé, était blanc et lisse, comme sculpté à la main par un artiste qui avait l'habitude de travailler la pierre, l'ivoire ou le bois. Ses sourcils bruns étaient dessinés distinctement

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Lancelot ou le chevalier à la charrette (Chrétien de Troyes, XII)

L’oie avait été atteinte au cou et elle perdit trois gouttes de sang qui se répandirent sur la neige blanche, telle une couleur naturelle. Elle n’avait pas été blessée au point de rester à terre et de laisser à Lancelot le temps d’arriver jusqu’à elle. Elle avait donc repris son vol et Lancelot ne vit que la neige foulée, là où l’oie s’était abattue, et le sang qui apparaissait encore.

Il prit appui sur sa lance et contempla la ressemblance qu’il y découvrait : le sang uni à la neige lui rappelle le teint frais du visage de son amie, et, tout à cette pensée, il s’en oublie lui-même. Sur son visage, pense-t-il, le rouge se détache sur le blanc exactement comme le font les gouttes de sang sur le blanc de la neige.

Plongé dans sa contemplation, il croit vraiment voir, tant il y prend plaisir, les fraîches couleurs du visage de son amie qui est si belle. Il passa ainsi tout le petit matin à rêver sur ces gouttes de sang, jusqu’au moment où sortirent des tentes des écuyers qui, en le voyant ainsi perdu dans sa rêverie, crurent qu’il som­meillait.

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Le Roman de Renart (anonyme, XIII)

Un jour, Renart s'introduit dans une basse-cour en quête de quelques poules. Celles-ci ont vu la haie remuer et s'en vont gloussantes vers la maison. Chante-clerc le coq les interpelle, il les rassure et s'endort sur le fumier. Renart s'avance tout doucement, tapi au sol, prêt à saisir le coq dans ses crocs. Manquant son coup, le goupil cherche alors à l'enjôler par des paroles flatteuses. Saura-t-il, comme son père Chanteclin, chanter les yeux fermés ?

Chanteclerc le coq se laisse tromper par Renart qui le saisit et l'emporte au loin. Alertés par les cris, les paysans se précipitent à leur poursuite. Par vantardise, le goupil leur crie que malgré eux il prend celui-là. Mais en desserrant la gueule, Renart permet à Chanteclerc de se dégager. Le coq se réfugie dans les branches d'un pommier tandis que le goupil reste en bas, furieux et fort dépité de l'avoir laissé échapper. Chanteclerc lui rit au nez : décidément, cousin Renart, on ne peut avoir confiance en vous !

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